Après une carrière de sportif de haut niveau. Gaël Angoula, Julien Peyre, Philippe Chassagne et Alexandre Maret épanouis dans leur nouveau métier d’arbitre. Une reconversion qui sort de l’ordinaire dans le milieu du sport.
Pour les anciens sportifs de haut niveau, la reconversion se tourne plus souvent vers les bancs d’entraîneurs ou de consultant dans les médias. Pour ces quatre athlètes de disciplines différente, la reconversion s’est tournée vers l’arbitrage. Une nouvelle vocation suscitée par la passion de leur sport. “Je voulais rester en contact avec le monde du rugby. Quand on a goûté ce sport en tant que joueur, on devient arbitre pour rester dans le milieu car on aime ça”, argumente Philippe Chassagne, ancien rugbyman et arbitre de haut niveau amateur pendant 17 ans. A 64 ans, ce dernier est toujours proche des terrains puisqu’il approche les 10 années de représentant fédéral (ndlr : un représentant fédéral accompagne les arbitres sur le plan administratif et sur le banc de touche lors des matchs).
L’amour du sport, c’est un sentiment partagé par Julien Peyre, ancien gardien de hockey qui s’amuse sur la glace depuis son plus jeune âge. “Je suis monté sur les patins à l’âge de 2 ans et j’ai commencé le hockey à 4 ans. Après une grosse période sur le banc lors de ma fin de carrière, j’ai décidé de sauter le pas. Je ne voulais pas quitter ce monde de passionnés du hockey où règne une ambiance extraordinaire. C’est aussi le moyen de rester au cœur du jeu et proche des joueurs”, confie l’homme qui a porté le maillot de l’équipe de France chez les jeunes.
Au cœur du jeu, Alexandre Maret, joueur de basket et arbitre depuis l’âge de 13 ans, a “vite basculé. J’ai toujours aimé prendre des responsabilités, mais je ne me voyais pas pratiquer ce métier. Plus jeune, le but était de découvrir en détail mon sport et d’aider mon club, qui avait besoin d’arbitre”.
“J’ai pratiqué un sport dont je ne connaissais pas les règles”
L’arbitrage a son importance dans tous les sports. Au basket, sa pratique est inculquée dès les premières années en club. Si les bases sont nécessaires pour une certaine connaissance de son sport, Alexandre Maret a approfondi ses connaissances, le sifflet à la main. “Je me suis aperçu qu’il y avait des zones d’ombre dans le basket et des règles que je ne connaissais pas. A chaque fois que je râlais sur l’arbitre, il avait complètement raison”, précise celui qui a évolué au haut niveau amateur. Pratiquer un sport sans connaître les règles, c’est ce qu’a vécu Gaël Angoula, joueur de football professionnel pendant 7 ans, dont 3 au SCO d’Angers “Je n’ai pas honte de le dire, j’ai pratiqué un sport dont je ne connaissais pas les règles. J’ai dû passer pour un imbécile par moment. L’arbitre applique juste le règlement”.
“On se rend compte que la contestation vient d’une méconnaissance de la règle, quand on passe de l’autre côté” constate Alexandre Meret. Une méconnaissance qui justifie le côté râleur de Julien Peyre lorsqu’il était joueur. “J’avais un bon rapport avec les arbitres, mais pendant les matchs je parlais beaucoup, voire trop, pour contester les décisions. En devenant arbitre, je me suis rendu compte que ce comportement ne fait rien avancer.” Arbitrer une rencontre sportive n’est pas une tâche facile. Il faut être attentif sur toutes les actions et avoir les yeux partout. Philippe Chassagne a pris conscience des difficultés de ce métier une fois de l’autre côté du sifflet « Quand un arbitre prend une décision, on est rarement pour. C’est en devenant arbitre que l’on prend conscience des difficultés. Au haut niveau, même avec l’assistance vidéo c’est compliqué de prendre des décisions. En amateur, la difficulté s’accentue obligatoirement”.
Pour ce dernier, l’arbitre ne peut pas influencer un résultat dans une rencontre. « J’entends souvent des plaintes après les matchs sur les arbitres. Pour moi un arbitre ne peut pas faire gagner ou perdre une équipe. Ce n’est pas à cause de l’arbitre si une équipe prend 40 points »
“J’ai horreur d’être un shérif”
La contestation est fréquente dans le sport et à tous les niveaux : “En devenant arbitre j’ai regretté la façon dont je me suis comporté en tant que joueur, confie Philippe Chassagne. J’ai manqué de respect aux arbitres et je n’aurai pas aimé que l’on me parle comme ça, même si je n’étais pas un joueur irrespectueux. J’ai été sanctionné pour des fautes de jeu, mais pas pour indiscipline« . Apprendre de ses erreurs, c’est bénéfique dans la vie d’une personne, notamment pour Julien Peyre. “Ca me sert en étant arbitre. Dans le feu de l’action, certains joueurs peuvent avoir des mots ou des gestes qui peuvent vite être déplacés. Je comprends ce comportement, mais je ne vais pas les tolérer lorsqu’ils sont excessifs. En revanche, c’est plus facile de les canaliser sur la glace”.
Chaque arbitre connaît le sport qu’il encadre pour l’avoir pratiqué lorsqu’il était jeune. Mais avoir évolué à haut niveau, “apporte une légitimité aux yeux des joueurs. Avoir eu la même place permet d’adapter sa pédagogie, avance Gaël Angoula. Certains joueurs ont plus de facilité à venir vers moi contrairement à mes collègues. Malheureusement, les joueurs attendent des choses totalement différentes des lois du jeu et on se doit de sanctionner certaines choses”.
Le dialogue avec les joueurs, c’est l’une des spécificités de Julien Peyre, qui aime être présent pour eux. “Arbitrer, ce n’est pas seulement siffler des buts et quelques fautes basiques. L’objectif, c’est aussi d’accompagner les joueurs. Dans mon cas, je parle beaucoup avec les joueurs dans différentes actions. Parfois, certains gestes sont limites, mais on peut ne pas les pénaliser. Dans ce cas, je vais avertir le joueur pour lui faire comprendre et éviter de nouveau ce comportement. Mais je vais aussi les féliciter quand ils font une belle action. Cela permet de créer un lien de confiance avec le joueur pour lui montrer que nous sommes là quand il faut sanctionner ou les protéger, mais aussi pour les accompagner dans le bon sens du jeu”
La pratique du sport à haut niveau favorise la science du jeu, mais également, de ce fait, la dimension physique. “Le fait d’avoir été joueur facilite la carrière d’arbitre, c’est indéniable. D’abord par rapport aux règles, mais aussi la condition physique. Être athlète de haut niveau est un avantage, car si tu te retrouves à 30 mètres de l’action tu ne peux pas être un bon arbitre, il faut être présent”, juge Philippe Chassagne, qui refuse de voir l’arbitre comme le méchant dans une rencontre : “j’ai horreur d’être un shérif sur le terrain. Quand l’entraîneur ou le joueur ne sont pas contents, je leur fais gentiment comprendre que ce sera la dernière fois pour ne pas avoir à sanctionner tout le temps”.
Un exemple pour de nouvelles vocations
L’amour du sport, une pédagogie adaptée et la condition physique font partie de la vie d’un arbitre de haut niveau. “Être arbitre professionnel, c’est beaucoup de travail mais aussi des sacrifices, explique Alexandre Maret. Il faut accepter de ne pas voir sa famille pendant plusieurs jours et partir chaque week-end en France ou à l’étranger. Mais la vie d’un arbitre ne s’arrête pas à la fin du week-end. Il y a aussi des interventions dans la semaine avec des stages de remises à niveau par exemple”. La reconversion professionnelle est aussi encouragée par l’entourage d’un arbitre. “Ma famille m’a soutenue, raconte Gaël Angoula. Ils savent que je me lance à fond dans chaque projet.
Aujourd’hui, ma femme me dis que j’aurais dû être d’emblée arbitre. Je suis épanoui dans cette pratique et je me sens plus responsable dans mon sport « . La responsabilisation sur un terrain peut attirer des nouveaux joueurs vers cette pratique. La responsabilisation sur un terrain peut attirer des nouveaux joueurs vers cette pratique. » Lorsque j’ai profité de cette proposition de reconversion avec la fédération, il y avait d’autres joueurs qui voulaient se lancer comme moi. Il y a eu un élan ces dernières années. Il faut continuer sur cette lancée” avance Gaël Angoula.
Devenir arbitre de haut niveau, c’est le pas qu’a notamment franchi l’ancien joueur de football professionnel, Karim Aït Fana. Sifflet à la main, ces nouveaux arbitres prennent des responsabilités différentes de celles exercées sur les bancs ou dans les médias.